Les voyageurs qui empruntent la ligne de tram T2 ou T5 connaissent la station « Boutasse – Camille Rousset ». Si tous comprennent que Camille Rousset est le nom d’une personne qui s’est illustrée, certains ne savent pas forcément que boutasse est un nom commun. Cette station porte en effet à la fois le nom du carrefour de « La Boutasse » et le nom de la rue toute proche « Camille-Rousset ». À Genas, il y a également une « rue de la Boutasse » et un arrêt de bus porte le même nom. Ces noms s’expliquent par le fait qu’il y avait à cet endroit une boutasse.
Boutasse est un mot régional qui signifie « mare, réservoir aménagé pour recueillir l’eau ». Ce mot, qui est encore bien vivant dans la région lyonnaise, ainsi que dans les départements contigus, est ancien. Il a, par exemple, été noté en 1797 par Georges-François Vincent qui, comme son contemporain Étienne Molard, voulait corriger le français des Lyonnais de son époque, comme le montre l’extrait suivant : « Boutasse. Il n’y a pas d’eau dans la boutasse. Dites : il n’y a point d’eau dans la mare ou réservoir ».
Le mot boutasse vient, par l’intermédiaire du substrat franco-provençal, du latin buttis, « tonneau ».
À côté de boutasse existe, dans une aire plus vaste, le mot régional serve qui désigne également un réservoir d’eau. Il vient du latin servare, « réserver, conserver ». Le mot boutasse n’est pas le seul nom commun d’origine franco-provençale qui est entré dans la toponymie locale. Par exemple, à Lyon, la rue de la Balme a été appelée ainsi parce que le mot balme désignait une hauteur, la rue Bellecombe évoque une ancienne combe (repli de terrain). À Villeurbanne, le toponyme La Doua vient d’un nom commun signifiant canal ou conduit d’eau, Les Charpennes d’un ancien nom désignant un bois de charmes.
Tribune de Lyon, 07/07/2016 LES MOTS DE LYON par Jean-Baptiste Martin